لخّصلي

VII.Rien de plus emouvant a cet egard que la lucidite avec laquelle certains Kabyles prennent conscience du fosse que l'enseignement unilateral creuse entre leurs femmes et eux << Le foyer, m'a dit l'un d'eux, n'est plus qu'un nom ou une armature sociale sans contenu vivant.Pourtant, on peut deja noter que Tizi-Ouzou, qui possede une belle ecole indigene de 600 places, refuse 500 etoliers par an.

Dans une ecole des Oumalous que j'ai pu voir, les instituteurs devaient refuser en octobre une dizaine d'ecoliers par classe.Aux Beni-Douala, on peut admirer une classe de 86 eleves ou les enfants sont cases un peu partout, entre les bancs, sur l'estrade et quelques-uns debout.Quant aux ecoles de filles, l'initiative louable prise par la colonie ne date pas de longtemps et il est certain que neuf douars sur dix en manquent.Il n'est pas rare, a l'heure actuelle, de voir des villages proposer un local, offrir une participation en argent ou de la main d'oeuvre gratuite pour qu'une ecole leur soit donnee.Ce qu'il faut dire cependant, c'est l'extreme importance que les Kabyles attachent a cet enseignement et l'unanimite avec laquelle ils reclament son extension.Le gouverneur general Lutaud, le 7 fevrier 1914, annonca meme solennellement la construction en Algerie de 62 classes et de 22 ecoles par an. Si la moitie de ce projet avait ete execute, les 900 000 enfants indigenes qui se trouvent aujourd'hui sans ecole auraient ete scolarises.Je n'ai pas traverse un seul centre de la Kabylie sans que ses habitants ne me disent leur impatience d'avoir des ecoles de filles.Il faut donc croire, pour parler net, que ces millions ont ete mal depenses et c'est ce que je me propose d'illustrer par des explications.En ce qui concerne la commune de Maillot, j'ai sous les yeux le decompte des ecoles par douar et par habitant.Mais c'est que le Kabyle, outre ses dispositions naturelles et son intelligence, pratique, a vite compris quel instrument d'emancipation l'ecole pouvait etre.Si je mets a part la dizaine d'ecoles grandioses recemment construites, la plupart des ecoles kabyles d'aujourd'hui datent de l'epoque ou le budget algerien dependait de la metropole, aux environs de 1892.Bien qu'il ne s'agisse pas ici de litterature mondaine, je crois que l'enumeration en serait fastidieuse.Ce que je traduirai en disant que
pres de 10 000 enfants dans cette seule region sont livres a la boue des egouts.Dans la region de Dellys, le douar Beni-Sliem, dont j'ai deja signale l'extreme pauvrete, a 9 000 habitants et pas une seule classe.Le resultat, je le resumerai en un chiffre aujourd'hui, un dixieme seulernent, des enfants kabyles en age de frequenter l'ecole peuvent beneficier de cet enseignement.L'ecole d'Adni qui compte 106 eleves en a rejete une dizaine, apres avoir mis a la porte les enfants ages de plus de 13 ans.Et nous eprouvons tous les jours l'impossibilite douloureuse de partager avec nos femmes un peu de nos sentiments.Et il n'est pas une de ces ecoles qui, aujourd'hui, ne refuse des eleves.Pour des raisons que je n'ai pas a approfondir, il n'a pas ete donne de suite a ce projet officiel.Or, les precisions que je vais maintenant donner prouvent sans contredit que la situation n'a pas ete sensiblement amelioree.Mais ce qui nous interesse ici, c'est le sort des douars et de la population kabyle.L'ENSEIGNEMENT

Les palais dans les deserts

La soif d'apprendre du Kabyle et son gout pour l'etude est devenue legendaire.Dans la region de Sidi-Aich, au village du Vieux Marche, 200 postulants se sont presentes en octobre.Donnez-nous des ecoles de filles, sans quoi cette cassure desequilibrera la vie des Kabyles.Aux Beni-Quacif, l'ecole de Bou-Abderrahmane vient de refuser une centaine d'eleves.Depuis deux ans, le village d'Ait-Allen offre un local qui n'attend qu'un instituteur.Le douar Ikedjane, qui compte 15 000 habitants, n'a pas une seule classe.>>

Le paradoxe

Est-ce a dire qu'on n'a rien fait pour l'enseignement kabyle?On a construit des ecoles magnifiques, une dizaine en tout, je crois.Breve histoire de l'enseignement kabyle

Du reste, c'est tout le probleme de l'enseignement en Kabylie.Est-ce a dire que la colonie n'a rien fait a cet egard?Le douar Aguedal, qui compte 11 000 habitants, a une seule ecole de deux classes.Qu'on sache seulement que pour 30 000 Kabyles environ la region dispose de neuf classes.Et ceci ne vaut pas seulement pour les garcons.Mais il ne manque pourtant pas de credits pour l'enseignement.Dans un recent discours, M. Le Beau a declare que plusieurs millions avaient ete consacres a l'enseignement indigene.A Djernaa- Saridj, une magnifique ecole de 250 eleves en a refuse une cinquantaine en octobre.Le douar Ittomagh, peuple par 10000 Kabyles, n'en a pas du tout.Il n'est pas rare non plus de voir ces offres inutilisees.A cette epoque, le projet Joly Jean-Marie envisagea la construction de nombreuses ecoles a 5 000 francs.Autour de Michelet, la situation est, si j'ose dire, plus instructive.Le douar Timzrit qui a la meme population a une ecole a une classe.Les plus somptueuses sont certainement celles de DjemaaJ'expliquerai
tout a l'heure ce paradoxe.Et ces classes comptaient deja des effectifs surcharges de 60 a 80 eleves.Le douar Azrou-N'-Bechar (6 000 habitants) n'a pas d'ecole.Mais on aurait mauvaise grace a chercher des responsabilites.tiques sont bien desservis.Mais voyons d'abord la situation.On en a recu une quinzaine.Le douar Ihadjadjene (5 000 habitants) n'a pas d'ecole.On evalue dans la region a 80% le nombre d'enfants.Chacune de ces ecoles a coute 700 000 a 1 million de francs.Ce pays manque d'ecoles.Le probleme est complexe.Au contraire.De 1892 a 1912, la construction d'ecoles a marque un temps d'arret total.prives d'enseignement.