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Ce chapitre traite de l'aménagement régional, affirmant que le régionalisme, loin d'être anarchique, est une solution pour l'avenir face à l'exploitation excessive du globe. Il suit un cycle : renaissance culturelle, puis développement économique et politique local. Contrairement à une idée reçue, la technique ne diminue pas l'importance du substrat naturel ; elle crée de nouvelles différences régionales, jusqu'au niveau du "micropays" (unité visible d'une tour). L'auteur distingue ensuite le pays rural (unité primordiale de culture) et la région (unité stratégique et économique complexe). L'histoire s'est construite par l'interdépendance des régions, non par la domination d'une ville. L'aménagement national doit considérer ces trois échelons : micropays, pays rural et région. La France utilise d'autres unités administratives (cantons, arrondissements, circonscriptions régionales), l'arrondissement servant d'échelon de transition. Le texte détaille ensuite les groupements d'urbanisme : urbains (limitant l'extension des villes), d'exploitation (du sol, sous-sol, cadre), et de production (étalant l'activité sur les courants d'échanges, non sur les voies). Les groupements de production, sous forme de rubans le long des vallées, formeront l'armature économique du pays. Il faut accentuer la personnalité de chaque région, adapter les techniques nouvelles aux productions traditionnelles, et gérer les zones industrielles existantes (structuration ou déplacement). La recentralisation industrielle est envisagée à quatre échelles, du regroupement de grands établissements à la dissémination d'ateliers familiaux, en privilégiant la création de nouvelles cités de producteurs, harmonieuses et humaines, évitant la création de banlieues ouvrières. L'artisanat joue un rôle crucial, et l'objectif est de créer un équilibre entre activités industrielles et agricoles. Enfin, l'auteur déplore l'échec des politiques antérieures, basées sur une centralisation aveugle, et la nécessité d'une véritable régionalisation pour redresser la situation.
CHAPITRE VI
L’AMÉNAGEMENT DES RÉGIONS
« Loin d’être anarchique ou réactionnaire », écrit Lewis Mumford, disciple de Geddes, « le régionalisme appartient au futur ». Le tour de la terre est fait, l’exploitation dévastatrice du globe n’est plus possible, il faut procéder à son aménagement, par coopération entre tous les peuples, et reprendre contact avec le réel, en prenant conscience de nos relations avec le sol. La France fut la patrie du régionalisme (1), en réaction contre la centralisation excessive qu’elle eut à subir en politique et en culture. D’ailleurs, dans tous les pays, le régionalisme tend à suivre un cycle régulier. Il commence par une renaissance de la poésie et de la langue, il finit par des plans destinés à ranimer économiquement l’agriculture et l’industrie régionales, par des projets de vie politique plus autonome, par l’établissement de centres locaux de science et de culture. Le régionalisme ne va pas contre la vie. Le potentiel d’une région, loin d’être diminué par l’augmentation de la culture et des arts techniques, en est au contraire magnifié. Des ressources en puissance deviennent en acte. La croyance populaire que « la technique diminue l’importance du substratum naturel » est à l’opposé de la réalité. Les différences régionales primitives peuvent diminuer par les contacts interculturels, mais les différences naissantes deviennent plus profondes, de nouvelles se créent, l’écologie se modifie pour se spécialiser. À moins que la région ne soit ruinée par une exploitation machiniste aveugle, chaque nouvelle occupation, chaque nouveau venu, fait apparaître une nuance ignorée, une spécialité particulière (pins dans les Landes, houille blanche dans les Alpes, betteraves dans le Nord, etc.). Plus l’homme cultivera les valeurs naturelles du sol et du sous-sol, plus il incorporera ses créations, plus il multipliera les différences entre les régions, en les rendant plus subtiles. On réalise ainsi que la première unité régionale est très petite et l’on comprend que Geddes la ramenait à « ce qu’un œil peut embrasser du haut d’une tour ». Nous l’avons baptisée : le micropays. La limite des régions naturelles varie suivant l’échelle à laquelle travaille celui qui les observe, remarque E. de Martonne. Au-dessus de ce micropays se rencontre le pays rural. C’est Camille Jullian qui a fait, le premier, la distinction entre les pays (pagi) habités par une tribu gauloise : unités primordiales de culture et d’exploitation, protégées au bord par des forêts, des marécages et des montagnes, et des régions proprement dites, infiniment plus complexes, véritables unités stratégiques et économiques, formées de territoires complémentaires, plaines et montagnes, bois et guérets, resserrant aux mêmes routes, convergeant vers le même fleuve, se commandant les uns les autres, et devant s’entendre pour la défense à la fois de leurs produits et de leurs moyens de défense. Ce sont des sociétés de protection et de solidarité mutuelle, des unités de résistance (1). L’histoire ne s’est pas faite en rupture autour d’une ville forte, mais en réseau dans l’interdépendance des régions. Dans la pratique, aucune région n’a l’unité qu’elle s’est livrée. Y.-M. Goblet pouvait écrire justement que l’histoire économique de la France est l’histoire de ses régions économiques. L’étude de tout Plan d’aménagement national devra donc être basée sur ces trois échelons territoriaux : le Micropays ou panorama d’ordre quasi biologique ; le Pays, unité primordiale de culture, traduction de la géologie agricole ; enfin la Région mondiale de culture, traduction de la géologie agricole.enfin; La Région : forte unité économique et spirituelle née de l’humanisation du sol. Les nécessités administratives françaises conduisent, en pratique, à d’autres unités. Les cantons, dont le groupement constitue soit (imparfaitement) la région agricole (I.N.S.E.E.), soit l’arrondissement. Les géographes comptent 4 à 500 pagi, 7 à 100 régions agricoles définies et 300 arrondissements. Quant à la Région, elle est formée par le groupement de départements et prend le nom de Circonscription d’Action Régionale. Il y en a 21 : Région parisienne, Champagne, Picardie, Haute-Normandie, Centre, Nord, Lorraine, Alsace, Franche-Comté, Basse-Normandie, Pays de la Loire, Bretagne, Limousin, Auvergne, Poitou-Charente, Aquitaine, Midi-Pyrénées, Bourgogne, Rhône-Alpes, Languedoc, Provence-Côte d’Azur-Corse (1) selon l’ordre (?) I.N.S.E.E. qui fournit non les départements mais les arrondissements constitutifs. Ainsi l’arrondissement devient-il l’échelon territorial de transition, soit pour l’action régionale supérieure, soit pour l’harmonisation des vies urbaines et rurales, dans un cadre restant à l’échelle humaine des contacts directs et quotidiens. I. Les groupements d’urbanisme La loi du 15 juin 1943, complétée par le décret du 31 décembre 1958, permet de constituer en « groupements intercommunaux d’urbanisme » les communes voisines que réunissent des intérêts communs, terme très vague. Aussi avons-nous essayé de reconnaître la fonction majeure les trois grands aspects de groupements : 1° Les groupements urbains ou d’échanges ; 2° Les groupements d’exploitation : a) du sol ; b) du sous-sol ; c) du cadre ; 3° Les groupements de production 1°Les groupements urbains ou d'échanges._Dès qu'une ville atteint et dépasse une dizaine de milliers de familles, elle tend à déborder de son territoire communal, à s’étendre sur les voisins et à transformer les proches villages en banlieues. On détermine ces groupements (il s’en trouve deux ou trois cents en France) en n’oubliant pas qu’il s’agit, d’abord, de limiter l’extension de ces agglomérations, puis de les faire essaimer, pour constituer des villes-fédérations. Celles-ci s’intégreront fréquemment dans d’autres groupements plus vastes d’exploitation ou de production immergés dans l’espace rural. Soulignons que les groupements urbains ont pour but, non d’uniformiser les communes composantes en une énorme agglomération, tel le Grand Anvers de l’occupation pourvu d’une administration unique — donc lointaine et incompétente — mais tout au contraire pour devoir d’affirmer l’autonomie sociale des composants fédérés, dont l’unité de direction ne peut concerner que les services publics communs ; 2° Les groupements d’exploitation. — a) Les groupements d’exploitation agricole coïncident avec les “pays ruraux”, dont nous verrons le traitement au chapitre VIII ; b) L’exploitation du sous-sol donne lieu à deux groupements de caractères bien différents : ceux relatifs aux mines, carrières et gisements de fer, et ceux relatifs aux eaux minérales, lesquels ressortent plutôt à l’exploitation du cadre. L’exploitation des mines doit seule justifier l’emploi de la curieuse expression de la loi : groupement de communes voisines limitrophes ou non ! La détermination des filons ou des couches permet de ne soumettre à certaines servitudes strictes que les communes où elles affleurent ; c) À l’exploitation du cadre — notion récente qui a donné lieu au développement chaque jour gran-disant du tourisme et du climatisme – il est logique d’ajouter le thermalisme : Une station thermale sans cadre ne restant qu’un lieu de mise en bouteilles. La géographie conduira à faire coïncider les limites de ces « cadres » avec les marches des pays naturels et non avec les réseaux de circulation ou les limites administratives actuelles ; 3° Les groupements de production. – Tous les groupements précédents, quel que soit leur intérêt, ne font que confirmer des situations de fait ; ils sont d’une grande utilité pour la coordination des services et peuvent permettre de grosses améliorations des structures existantes. Ils n’ont toutefois pas une action particulièrement dynamique sur la nation. Ils ne permettent pas de créer les structures nouvelles indispensables au retour à l’équilibre démographique et économique. Cette mission est plus spécialement réservée aux groupements de production. Au lieu de continuer à congestionner les centres déjà trop peuplés, embrochés sur les voies ferrées, il s’agit d’étaler l’activité productrice sur toute la largeur des courants d’échanges. On confond, depuis longtemps, les courants d’échanges et les voies. Un courant d’échanges est une sorte de coulée, qui peut mesurer 20 à 50 kilomètres de large, établie le plus fréquemment en une vallée. Au cours des siècles, à l’intérieur de ce courant on relève trois ou quatre tracés de voies : piste, route romaine, chemin médiéval, route nationale, autoroute… (tracés se déplaçant latéralement dans cette sorte de thalweg mi-géographique, mi-économique) sans oublier les voies d’eau et de fer. Il faut utiliser un courant d’échanges dans toute sa largeur et (de même qu’on double une avenue importante de contre-allées) il faut doubler la route actuelle, étranglée dans des passages urbains, par des routes latérales en bordure du lit majeur de ce courant d’échanges, routes latérales réunies à la Nationale actuelle par les bretelles indispensables. Cette méthode a deux conséquences importantes. C’est une coûteuse politique de rapiéçage que de multiplier les voies de déviation autour des cités existantes, sorte de compromis qui ne profite à personne, ni à la ville évitée, ni à la route transformée en sinusoïde, ni aux divers usagers, et surtout pas à l’ensemble de la nation. D’autre part, les autoroutes rapides ne peuvent pas être conçues (dans un pays aussi petit que le nôtre) comme de simples diagonales, permettant d’aller vite d’un point à un autre, sans souci des régions intermédiaires. Les dépenses engagées doivent servir effectivement aux villes côtoyées. C’est pourquoi le dédoublement des routes existantes, par des voies parallèles à une vingtaine de kilomètres de distance, résoudrait le problème du contournement et permettrait en même temps de revigorer les villes et villages convenablement situés puisque dans le courant d’échanges, donc se prêtant à une telle renaissance. Ces latérales desserviront et soutiendront ainsi dans le courant d’échanges, tout en étant suffisamment éloignées des centres actuels pour éviter les dangers de toutes sortes que présente la concentration.
Alors que les groupements urbains tendent naturellement à la tache d’huile, que les groupements d’exploitation modèlent leurs vastes nappes sur la topographie, la géologie profonde ou superficielle, les groupes de production offriront essentiellement L’apparence de rubans, généralement de ceintures de vallées, comme dans la « redistribution » entreprise aux États-Unis. Alors que la concentration industrielle, au long du fil du rail, ne faisait qu’engrosser démesurément quelques agglomérations, au détriment d’un semis de petites cités isolées (anciennement actives, éducatrices d’hommes sains et industrieux aujourd’hui rejetées dans l’ombre) la route vivifiera des courants d’échanges élargis et exploités au maximum. Ces rubans seront parfois très étendus et ramifiés, telles la vallée du Rhône et sa liaison avec le Rhin. Il s’ensuit qu’à l’intérieur de ces groupements il y en aura d’autres, compris soit en entier : groupements urbains, soit en partie : groupements touristiques et miniers, qui pourront chevaucher transversalement ou longitudinalement. Ainsi, les exploitations et les établissements importants de production se développeront suffisamment, à proximité et dans le sein même de courants d’échanges. Ces groupements de production, qui relieront entre elles les régions, qui cerneront les plateaux où la vie s’étale mais ne coule pas, dessineront en somme la véritable armature économique du pays. M. Y.-M. Goblet a mis en relief la coexistence des régions d’économie traditionnelle et des zones d’industries jeunes, imposées ou assimilables, qui souvent s’opposent (1). Il faut donc accentuer la personnalité de chaque région, en affirmant son économie locale, et en adaptant les techniques nouvelles aux productions traditionnelles. Quant aux « zones » plaquées il faut, suivant les cas, soit chercher à les structurer, à en faire de petites régions nouvelles par suite d’apports complémen-taires sociaux ou économiques, soit les extirper du milieu qu’elles désagrègent (par ex. les industries automobiles de la Région parisienne) et les regrouper suivant les méthodes de recentralisation. Attirons à nouveau l’attention sur le danger que représenteraient des groupements d’urbanisme basés sur le même caractère des composants, sur cet esprit de cloisonnement qui tend à créer des servitudes uniformes et non à solidariser des unités organiques. Tous les groupements d’urbanisme, plus ou moins enchevêtrés, ne pourront vivre que s’ils sont organiquement intégrés dans la vingtaine de régions françaises. Il ne faut pas les concevoir seulement comme des groupements d’équipement, facilitant la coordination administrative, mais comme de véritables communautés structurant notre diverse et complexe nation. II. — La recentralisation industrielle La décongestion des métropoles, ou des régions surchargées par des zones d’industries jeunes, peut se pratiquer de quatre façons, ou mieux, à quatre échelles différentes : 1° Par regroupement de grands établissements d’industries complémentaires en des courants d’échanges jugés utiles. Établissements de plus de mille ouvriers : il y en a un millier en France ; 2° Par transfert des établissements moyens auprès des cités régionales. Établissements de cinquante et un à cinq cents ouvriers : il y en a une quinzaine de mille en France (1) ; 3° Par dispersion des petits établissements dans des villages importants. Établissements de six à cinquante ouvriers : il y en a une centaine de mille en France ; 4° Par dissémination de la fabrication des petits éléments dans des ateliers familiaux. Dans les deux premiers cas, nous nous intégrons dans la structure urbaine à l’échelon : cité proprement dite. Nous posons comme règle primordiale : tout établissement industriel ne peut s’ériger à moins de 2 kilomètres d’une zone résidentielle, ce qui, dans notre pays de petits finages, conduit à ne prévoir aucune zone industrielle gênante sur de nombreux territoires communaux. 1° Regroupement des grands établissements. — Dans le cas de regroupement — le plus rare — il s’agit d’extirper de gros établissements donnant lieu à des sous-produits importants, d’où une cascade d’industries connexes et difficiles à dissocier. Ces entreprises complémentaires seraient regroupées en des ensembles géographiques particulièrement bien desservis par les voies d’eau, de terre et de fer, telles que ceintures de vallées permettant la disposition de combinés industriels, en chapelets. Ces « combinés », pouvant réunir jusqu’à une dizaine de milliers de familles, ne peuvent être fédérés à des métropoles importantes dont l’expansion démographique, sous forme de ville-fédération, serait inacceptable. Il faut tendre à la création de nouvelles cités de producteurs, non pas selon les conceptions actuelles de cités ouvrières actuelles (cités organiques, possédées par une seule industrie, ou faubourgs-dortoirs dus au rail), ni par la forme, car ces communautés devront être des villes polynucléaires à noyaux compacts et non des banlieues débitées au kilomètre, ni par la composition qualitative de leur population. Une organisation vivante du travail conduira à faciliter leur self-expression aux ouvriers exécutants ; cadres et patrons y vivront en permanence, enfin l’élite intellectuelle et technique (nécessaire aux laboratoires de recherche, écoles de perfectionnement, etc.) y sera attachée. Si les grands ateliers, les fours, les sources d’insalubrité et de danger doivent être à 2 kilomètres, il sera au contraire de règle de nourrir ces cités d’un artisanat éclairé, constitué d’anciens ouvriers qualifiés s’installant, à leur compte, pour les fabrications complémentaires des grosses industries locales. Le climat de ces communautés devra être un climat de production sans cesse perfectionnée, de création continue, de recherches dans tous les domaines, et non un climat de cités mercantiles. Ces nouvelles cités seront de véritables villes-franches avec charte, dans lesquelles ouvriers, employés, cadres et patrons vivront en communauté d’autant plus vivante que chacun sera associé à la production. La réussite humaine de ces villes neuves dépendra du soin apporté à la formation d’une véritable âme urbaine, cette âme dont la présence fait qu’un quelconque village est immédiatement juxtaposé aux cités-jardins les plus signées (!). Cette âme communautaire pourra jaillir si l’agglomération des habitants se développe autour des édifices communs : lieux d’éducation, d’apprentissage, de culte, de culture et de loisirs, réalisés en premier, si le développement a lieu par fédération d’échelons, rassemblés autour de leurs pôles respectifs, et liaisonnés entre eux en leurs points de contact ; si l’on remplace la ponctuation des villas isolées par de petits bouquets de maisons ; enfin si la charte de ces communautés est juste. Nous ne méconnaissons nullement les difficultés que rencontrent toutes les villes neuves. Elles ne peuvent réussir que si elles sont nécessaires et ont la géographie pour elles (étang de Berre, par ex.). Or, l’expérience montre que le déséquilibre social et politique de plusieurs nations européennes, dû aux « grands nombres », vient de ce que, pour faire face à la trop rapide augmentation de population du siècle dernier, et faute de chefs capables de fonder de nouveaux essais, on n’a pas su créer les nouvelles villes, les nouvelles cités, à l’échelle humaine, qui se fondaient jadis à chaque nuée de la civilisation. 2° Transfert des établissements moyens. — On envisage plus généralement la recentralisation par petits groupes de quatre à cinq établissements moyens, de catégories différentes, à proximité des trois cents petites villes de 10 à 20 000 habitants, qui parsèment la France. Le noyau ancien doit être choisi d’un volume sensiblement supérieur à l’apport nouveau afin de n’être pas déséquilibré par lui. Il s’agit d’une véritable transfusion d’activité — tant manuelle qu’intellectuelle grâce aux cadres supérieurs — trans-Fusion à échelonner, pour ne pas détruire les valeurs urbaines préexistantes et ne pas dépasser la cité optimum de dix mille familles. Là encore, il ne peut être question d'étaler des banlieues ouvrières à côté des cités existantes pendant qu'ingénieurs et directeurs iraient habiter le noyau central. Il faudra fédérer à la cité une grappe de nouveaux échelons domestiques et paroissiaux, constituant de véritables communautés, dans lesquels classes et catégories, de même qu'immigrants et indigènes, se fusionneront. Et, en tout premier, créer ou renforcer un centre social, pôle de réunion et de liaison important et actif où se distillera l'âme de la cité renouvelée. La centralisation, ce grand œuvre, ne doit pas se concevoir comme un repliement, mais bien au contraire comme un épanouissement industriel. La recréation de l'industrie française nécessite un rajeunissement total de l'outillage et surtout la fabrication de notre propre outillage. Fabriquer cet outillage de qualité implique la constitution d'un nouvel artisanat de précision pour la fabrication des prototypes, puis leur exécution en séries limitées — artisanat qui se superposera à l'artisanat traditionnel des objets sur mesure. Pour faire éclore ces créateurs et ces exécutants de qualité il nous faut créer des cadres harmonieux et des milieux sociaux favorables, autrement dit des cités de l'outillage moderne comme se formèrent jadis les cités de l'horlogerie ou de la taillanderie. Par ailleurs, la nouvelle civilisation rurale sera particulièrement favorisée par l'artisanat. Celui-ci n'est pas en régression (1). La petite industrie fait montre d’une étonnante vitalité parce que d’une remarquable puissance d’adaptation. Chaque année, apparaissent des centaines de nouvelles petites industries. La progression du savoir et le machinisme léger conduisent à la multiplication d’industries artisanales à main-d’œuvre de qualité, qui foisonneront bien davantage dans un système de « justes échanges ».
3° Dispersion des petits établissements. — Cette troisième forme de recentralisation est bien connue. Elle consiste à disperser les petites industries artisanales auprès de villages, dans des aires géographiques limitées : vallées naturelles ou « pays ». Si des industries de fixation doivent être suscitées dans les villages, elles ne doivent pas impliquer un apport d’immigrés, lequel risquerait de compromettre la délicate et lente élaboration de la nouvelle civilisation rurale. Ces industries ne doivent servir qu’à absorber l’excédent naturel de la population et nullement, comme dans les cas précédents, à amorcer un mouvement migratoire.
Les industries choisies doivent être adaptées à la main-d’œuvre rurale et, en outre, aux besoins locaux qui réclament un équipement particulier, résistant aux rudes conditions d’emploi.
Il faudrait se garder de laisser s’implanter des industries qui nécessiteraient une main-d’œuvre importante, notamment pour construire un danger concernant les besoins agricoles. Celles-ci ne devront s’établir qu’auprès de villages-centres, soigneusement détectés, et ne seront autorisées à se développer qu’au rythme de l’accroissement naturel de la population (cf. chap. VIII). L’industrie artisanale, qui peut comporter une dizaine de compagnons, doit remplacer les artisans isolés qui « citadinisaient » nos villages il y a un siècle. Elle doit y être facteur de stabilisation et non de désagrégation.
4° Dissémination des ateliers familiaux. — C’est encore sous un nouvel aspect que se pose la dissémination. Cette fois, on ne désire plus subdiviser la masse des producteurs agglomérés en des groupes locaux, à la taille de l’homme, mais reconstituer un non-salariat mi-ouvrier, mi-paysan dans lequel se synthétiseraient les vertus de stabilité et de fécondité des couches rurales et celles de perfectionnement continu des artisans.
Il s’agit de former une population vivant à la fois du sol et d’un travail industriel de complément dans les régions pauvres, et plus généralement, d’un travail industriel et d’une culture complémentaire.
Pour la génération qui vient, cette alternance des activités (individuelle ou familiale, simultanée ou périodique) n’est applicable qu’à certaines réalisations rurales mais à de nombreuses catégories d’industries : bois, cuir, textiles, ainsi qu’à la fabrication de multiples pièces détachées du machinisme léger et du bâtiment.
Bien qu’Henry Ford l’ait réalisé volontairement pour la première fois en Amérique, il ne s’agit nullement, en France, d’une expérience, mais d’un retour à un état d’équilibre, bien connu de ceux qui ont analysé les agglomérations rurales. Cette dernière solution est d’une grande portée humaine. Elle réalise la déprolétarisation de l’ouvrier et offre une main-d’œuvre d’appoint aux périodes de pointes. Elle nécessitera un développement particulièrement poussé des méthodes d’organisation du travail, des programmes adaptés aux saisons. Elle permettra en outre la réduction nécessaire, définitive ou périodique, de la main-d'œuvre agricole, consécutive à l'équipement motorisé, à la coopération et aux besoins tertiaires. Ces quatre formes de recentralisation, à buts bien différents, montrent que l'industrie n'a joué là qu'un rôle d'aimant dans une vaste politique de logement et de regroupement social. Politique qui ne peut atteindre son plein développement que dans une économie d'équilibres régionaux et d'équipement rural. Les importantes migrations en vue du retour à l'équilibre démographique pouvaient et devaient être entreprises immédiatement, par suite des considérables destructions de toutes sortes. De même que la vétusté de notre outillage supprimait l'objection de l'amortissement en matière de déplacement d'usines, le coût des nouveaux logements n'était pas une dépense supplémentaire ou peu judicieuse dans le domaine de l'immédiat. La décentralisation a commencé aux deux premières échelles seulement. Et maladroitement par parachutage d'usines trop importantes pour le milieu, en raison d'une confusion entre la concentration financière et la concentration géographique. L'Italie seule commence à pratiquer la constitution de véritables complexes industriels, mais sans envisager la création correspondante de véritables cités de producteurs. Certaines métropoles régionales risquent ainsi de devenir des « monstres », au milieu du désert de leur région. L'exemple de Clermont-Ferrand est bien connu. À la simple fuite des cadres, surtout, vers les résidences secondes (10 % des principales) doit succéder une réintégration des citadins animateurs dans les villages et villettes. En 1945, le régionalisme vivant a été supprimé au profit d'un jacobinisme outrancier et d'une centralisation économique aveugle. Il a fallu attendre le Ve Plan (qui n'est d'ailleurs qu'un programme) pour que les planistes s'aperçoivent de leur échec : inflation rampante, augmentation des déséquilibres démographiques, insécurité généralisée, incapacité de résoudre le problème majeur du logement. On vient enfin de décider de régionaliser le Plan... Malheureusement cette régionalisation est postérieure à l'établissement du Plan, lequel aurait dû être le couronnement d'une fédération d'efforts. Vingt ans de perdus par ignorance de la géographie, qui s'ajoutent à l'impéritie antérieure. Le redressement à opérer est immense
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